Nouvel Humanisme Planétaire

Bonjour,

Je voulais vous faire part d'un Texte extraordinaire, un pur joyau, écrit par une vieille âme, Georges LE NEURES ( 96 ans ) à l'origine d'un Blog "Nouvel Humanisme Planétaire" évoquant une Seconde "Renaissance", quelques Siècles après celle de Florence ? :


"Chers amis,

Je ne crois pas excessif d'affirmer
qu'en cette époque de début
du troisième millénaire,
nous vivons une situation très particulière
à la fois inquiétante et passionnante
qu'on entend souvent qualifier de "MUTATION",
c'est à dire de profond changement
sur tous les plans et à tous les niveaux
de l'économie, de la technologie,
de la société, de la morale et de la pensée...

Une époque fascinante, certes, pour ceux
qui ont le privilège de pouvoir la vivre
avec un certain recul, une époque
qui, cependant, attend de chacun de nous
un singulier effort d'adaptation continue
pour ne pas se trouver à tout moment "déphasé".
crise économique, mondialisation des problèmes,
surpopulation, pollution généralisée,
incertitude du lendemain.

Certains jours de "déprime" peuvent nous donner
le goût amer de la fatalité et de l'absurde
où l'on se pose la question : C'est ça la vie ?

Dans ce contexte qui est rude et sinueux,
on entend de plus en plus s'élever des voix
de prophètes qui se veulent investis
d'une mission de sauvetage ou de rénovation.
Dans le réel, tout être humain
à la naissance, est investi d'une mission,
d'un objectif plus ou moins important.
C'est parfois un seul être à aider ou à sauver ;
c'est dans tous les cas la pathétique mission
de se réaliser soi-même et de pouvoir
s'exprimer envers et contre tout.

Puisque j'ai eu le bonheur de parvenir
à m'exprimer par l'écrit et la parole
mais aussi de résister à l'angoisse
au pessimisme, au défaitisme tout au long
des années de cette condition terrestre...
Puissé-je dans ces propos assumer
pour le mieux, sinon la mission, au moins
la présence rassurante, la communication
généreuse auprès des êtres,
amis que je connais et que j'aime,
ou inconnus qui de loin en loin
sont les amis de mes amis, auprès de vous
amis lecteurs qui, dans le doute,
l'espoir ou la crainte cherchez un sens
à votre vie, une cible, une issue,
qu'elle soit ici-bas exclusivement,
au-delà de cette terre, dans le secret
de vos pensées, ou nulle part.

S'il ne s'agit pas d'une mission
à proprement parler, alors penserez-vous,
en quoi consiste cette présence rassurante,
cette amicale communication ?

C'est, en toute franchise, le fervent désir
de partager le fruit d'une recherche
de longue haleine, d'une recherche s'ouvrant
sur une lueur... une lueur qui ne cesse
de briller au fond des coeurs
dans les moments les plus ingrats.

Cette petite lumière, parfois très vive,
m'a guidé pendant de laborieuses années
dans une oeuvre CONSTRUCTIVE qu'aujourd'hui
je vous offre comme un présent qui,
je le souhaite, fera vibrer dans votre intimité
les cordes les plus sensibles.

Acceptez seulement qu'un prologue
de réflexions vous acclimate aux propos
inattendus des pages à venir.

Depuis les temps les plus anciens,
des philosophes prestigieux
ont tenté de définir pour l'humanité
une ligne de sagesse,
un mode de raisonnement, un système
de recherche en vue de résoudre
l'énigme la plus troublante qui soit :
Qu'est-ce que la vie ? D'où vient l'univers ?
Quelle est l'origine de l'être et des choses ?
-l'origine et l'aboutissement-
autrement dit, la causalité et la finalité ?
Pourquoi l'être, pourquoi la vie ?
Que suis-je ? Pourquoi suis-je ?

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Qu'est-ce donc que la philosophie...
cette matière dont l'enseignement apparaît
furtivement, tardivement
au terme d'un périple scolaire
où elle ne laissera chez la plupart des élèves
qu'un souvenir de tension intellectuelle
et de discours fastidieux sans rapport
apparent avec le quotidien ?

Aussi, la philosophie s'est vue longtemps
sous-estimée. "Etre philosophe"
dans le langage populaire signifie
tout bonnement: vivre paisiblement,
sans prétention, accepter les revers
sans amertume, ne pas dramatiser,
faire contre mauvaise fortune bon coeur.

La philosophie, au sens noble du terme,
c'est bien autre chose.
Dans l'antiquité, elle était considérée
comme la science générale,
englobant toutes les autres, la science
du SAVOIR VIVRE par excellence.

De nos jours, dans sa forme classique,
elle s'exprime en cinq branches
principales et complémentaires :
la logique, la psychologie, la morale,
l'esthétique et la métaphysique.
C'est-à-dire :
. l'art du raisonnement juste,
. la connaissance de soi et de la vie intérieure,
. les règles de vie sociale et familiale,
. l'étude de la créativité artistique
. et l'approfondissement des mystères de la vie
et de la mort, incluant ainsi même la religion.

Ces cinq branches associées,
qu'on aurait tort de séparer,
devraient donc concerner les trois aspects
primordiaux de l'existence :
l'intelligence et la réflexion,
la volonté et l'action
la sensibilité et l'intuition.

Cet ensemble idéal, s'il était réalisé,
génèrerait un prototype humain, intellectuel
sensitif et manuel de haute performance,
un prototype qu'on aimerait voir un jour
fleurir sur cette planète.
Ainsi un politique, un savant ou un technicien,
considérés comme l'élite de notre monde,
ne sauraient se concevoir sans une bonne dose
de cette philosophie intégrale
à laquelle ils auraient souvent recours
sans même s'en rendre compte.

Vues sous cette optique, les difficultés
innombrables auxquelles se heurtent les humains,
notamment en cette époque confuse et tourmentée,
se ramèneraient à une regrettable méconnaissance
de cette plénitude du savoir-vivre
philosophique.

C'est pour cette raison vraisemblablement
que l'on voit avec étonnement ressurgir,
dans l'actualité culturelle, des groupes,
des clubs de rencontre philosophique
comme un nouveau refuge que certains
préfèrent à celui de la secte,
de l'occultisme ou de l'ésotérisme.

Ce n'est pourtant pas à un débat
de philosophie traditionnelle que je vous convie
dans cette lecture, car en ce domaine
le désir de discourir et de briller a vite fait
d'occulter le sens concret de la vie.
Et l'exposé ingénieux des idées et des systèmes
se limite alors à un jeu intellectuel stérile
qui n'affecte que la surface cérébrale
de la conscience.
N'allons surtout pas retomber dans cette ornière
qui a discrédité la vraie philosophie.


Entrons donc dans le vif du sujet avec quelques
aphorismes, phrases-choc de personnages célèbres,
dont la signification n'a pas fini de préoccuper
l'entendement de nos contemporains.

Ainsi, nous tenons de l'illustre Socrate
ce fameux "connais-toi toi-même" tellement
commenté et sur lequel il reste tant à dire.
Dans la même lancée, en ce vingtième siècle,
Gaston Bachelard nous invite à nous psychanalyser
nous-mêmes en toute circonstance utile.

Au début de notre ère, Jésus de Nazareth s'exclame :
" Aimez-vous les uns les autres"
Ce à quoi Jean-Paul Sartre désabusé rétorque :
"L'enfer, c'est les autres !"
Karl Marx, métaphysique à ses heures, affirme
de son côté: "Les coïncidences n'existent pas,
ce sont des nécessités inconnues des humains".
Or, l'évangile de Jésus n'a-t-il pas déjà formulé :
"Pas un cheveu ne tombe de votre tête
sans le consentement de mon Père".

Permettez, amis lecteurs, que je pousse
un peu plus loin cette sélection de grandes phrases...
En son temps, quatre siècles avant notre ère,
Platon s'est ainsi prononcé :
"La vérité, objet de la science, n'est pas
dans les phénomènes particuliers et passagers,
mais dans les idées, types purs de chaque
groupe d'êtres.
Au sommet se trouve l'idée du bien".
Tandis qu'Aristote formulait un siècle plus tard
"L'univers est une pensée, qui ne se pense pas,
suspendue à une pensée, qui se pense".
Vous verrez plus loin que c'est moins
énigmatique qu'il ne parait.

Et je cite à nouveau Jean-Paul Sartre qui a marqué
ce dernier siècle : "L'homme, qui se manifeste
d'abord d'une existence quasi-métaphysique,
se crée et se choisit lui-même en agissant".
Cependant que Teilhard de Chardin,
sur un ton plus engagé, nous élabore
une synthèse des phénomènes physiques
et biologiques concluant à une évolution
de l'univers et à une fusion dans le divin.

Saint Augustin, le grand exégète de la chrétienté,
nous assoit d'étonnement dans cette sentence :
"L'éternité n'est rien d'autre que la possession
totale de soi-même dans un seul instant".
Et des profondeurs de l'Orient nous tenons
cet adage : "L'homme est un ange déchu
qui se souvient du ciel".

J'évoquerai pour finir
cette adorable pensée de Saint-Exupéry,
qui rejoint l'enseignement biblique :
"L'essentiel est invisible pour les yeux,
on ne voit bien qu'avec le coeur".
C'est aussi ce que déclare Ramakrishna,
mystique de l'Inde moderne : "C'est par le coeur
que l'homme peut se joindre à l'infini".

On pourrait en ajouter des centaines
plus ou moins percutantes ou mystérieuses,
qui n'émanent pas nécessairement
de philosophes reconnus, mais dont la diversité
nous donne une idée de la richesse
et de la profondeur des courants de la pensée,
même quand ils proviennent de personnages
qui semblent s'opposer ou se combattre."

Merci Helinata

J'ai bien aimé ce post.

Y a de tout dans ce forum, des paroles éternelles, des dérappages fort contrôlé et beaucoup d'amour.

J'adore.

Et puis, c'est bien de nous faire connaître la pensée des ainés. On dit que c'est une bibliothèque qui brule le jour de leur départ. Il faut qu'il en reste quelque chose.

J'ajoute ici la pensée d'un vieux bourlingueur, un soldat perdu que j'hésitai à poster depuis quelques mois, entre autre chose parce qu'il marqué par son passé militaire et j'ai rarement entendu parler de l'armée dans ce forum, au contraire

(et puis, il a une position un peu tranchée sur la bio éthique. Bon, on est grand, on peut tout lire, sans être tous d'accord, non)

Le temps est venu de vous présenter Hélie de Saint Marc.

Citation :

« QUE DIRE A UN JEUNE DE 20 ANS »

Quand on a connu tout et le contraire de tout,
quand on a beaucoup vécu et qu’on est au soir de sa vie,
on est tenté de ne rien lui dire,
sachant qu’à chaque génération suffit sa peine,
sachant aussi que la recherche, le doute, les remises en cause
font partie de la noblesse de l’existence.

Pourtant, je ne veux pas me dérober,
et à ce jeune interlocuteur, je répondrai ceci,
en me souvenant de ce qu’écrivait un auteur contemporain :

«Il ne faut pas s’installer dans sa vérité
et vouloir l’asséner comme une certitude,
mais savoir l’offrir en tremblant comme un mystère».

A mon jeune interlocuteur,
je dirai donc que nous vivons une période difficile
où les bases de ce qu’on appelait la Morale
et qu’on appelle aujourd’hui l’Ethique,
sont remises constamment en cause,
en particulier dans les domaines du don de la vie,
de la manipulation de la vie,
de l’interruption de la vie.

Dans ces domaines,
de terribles questions nous attendent dans les décennies à venir.
Oui, nous vivons une période difficile
où l’individualisme systématique,
le profit à n’importe quel prix,
le matérialisme,
l’emportent sur les forces de l’esprit.

Oui, nous vivons une période difficile
où il est toujours question de droit et jamais de devoir
et où la responsabilité qui est l’once de tout destin,
tend à être occultée.

Mais je dirai à mon jeune interlocuteur que malgré tout cela,
il faut croire à la grandeur de l’aventure humaine.
Il faut savoir,
jusqu’au dernier jour,
jusqu’à la dernière heure,
rouler son propre rocher.
La vie est un combat
le métier d’homme est un rude métier.
Ceux qui vivent sont ceux qui se battent.

Il faut savoir
que rien n’est sûr,
que rien n’est facile,
que rien n’est donné,
que rien n’est gratuit.

Tout se conquiert, tout se mérite.
Si rien n’est sacrifié, rien n’est obtenu.

Je dirai à mon jeune interlocuteur
que pour ma très modeste part,
je crois que la vie est un don de Dieu
et qu’il faut savoir découvrir au-delà de ce qui apparaît
comme l’absurdité du monde,
une signification à notre existence.

Je lui dirai
qu’il faut savoir trouver à travers les difficultés et les épreuves,
cette générosité,
cette noblesse,
cette miraculeuse et mystérieuse beauté éparse à travers le monde,
qu’il faut savoir découvrir ces étoiles,
qui nous guident où nous sommes plongés
au plus profond de la nuit
et le tremblement sacré des choses invisibles.

Je lui dirai
que tout homme est une exception,
qu’il a sa propre dignité
et qu’il faut savoir respecter cette dignité.

Je lui dirai
qu’envers et contre tous
il faut croire à son pays et en son avenir.

Enfin, je lui dirai
que de toutes les vertus,
la plus importante, parce qu’elle est la motrice de toutes les autres
et qu’elle est nécessaire à l’exercice des autres,
de toutes les vertus,
la plus importante me paraît être le courage, les courages,
et surtout celui dont on ne parle pas
et qui consiste à être fidèle à ses rêves de jeunesse.

Et pratiquer ce courage, ces courages,
c’est peut-être cela

«L’Honneur de Vivre»

http://www.heliedesaintmarc.com/Quelques_vertus.htm

Woaowwww....

Merci. Magnifique à lire, ça parle aux tréfonds de l'âme. Pas facile à appliquer, c'est notre lot d'humains.

t puis, c'est bien de nous faire connaître la pensée des ainés. On dit que c'est une bibliothèque qui brule le jour de leur départ. Il faut qu'il en reste quelque chose.
Je regrette de ne pas avoir parler plus avec mon grand-père de la vie à la campagne en 14-18 . Il remplaçait son père il avait 10ans en 14 , plutôt il aidait sa mère , dans une ferme à quelques km de la notre aujourd'hui . Et pourtant à des années lumières . ya qu'une chose de commun casser la glace pour les bêtes c'est tout ! Un homme qui à 94 ans ma dit j'ai pas réussi à me tuer en tombant , et quelques semaines plus-tard quelques heures avant la liberté , je n'ai jamais eu aussi mal (infarctus)!
pépère ta présence tranquille à bercer mon enfance , mon adolescence, ma niaiserie de jeune adulte ! salut mon pépère!

Merci à vous pour ces textes si inspirants.

Nous vivons une période extraordinaire ou tout semble engagé dans un processus de transformation gigantesque dont on ne sait sur quoi il débouchera.
J'ai le sentiment que nous allons être sacrément éprouvés, dans nos vies, dans nos croyances, dans nos habitudes.
Peut-être pleurerons-nous sur ce qui disparaîtra à jamais. Peut-être accueillerons-nous avec courage et foi ce qui s'annonce comme "l'apocalypse", la révélation d'une nouvelle conscience, et l'émergence d'une nouvelle humanité.

Mais quoiqu'il en soit, nous faisons partie de ce processus et nous pouvons choisir de lui donner une orientation personnelle, en proposant d'élever la vibration de l'ensemble.

.

J'aime beaucoup ce topique et j'en profite pour vous dire que oui on est en train de changer, de muter et que oui je me sens très proche de vous. Je prends conscience actuellement que je me sens plus proche de vous que de mes autres relations avec lesquelles je suis un peu en décalage. Ceci est donc une petite déclaration d'amour. Je me suis toujours ou très souvent sentie en décalage dans les mileiux les jobs où j'ai évolué. là j'ai l'impression d'être au chaud parmi vous et je me réjouis à l'idée d'en croiser certains à l'ET Yzeron. Lors de la formation Mire chez moi j'avais des bouffées d'amour pour ceux qui étaient là et le matin j'ai ces mêmes bouffées d'amour quand je vous lis. Merci à vous tous.

Ben tu vois, c'est là que je me dis, Bgor, que même avec des Cosmic de temps en temps, j'ai bien fait de fonder ce forum.

Vous savez quoi ? Vous me faites le bonheur.

bgor a écrit:

J'aime beaucoup ce topique et j'en profite pour vous dire que oui on est en train de changer, de muter et que oui je me sens très proche de vous. Je prends conscience actuellement que je me sens plus proche de vous que de mes autres relations avec lesquelles je suis un peu en décalage. Ceci est donc une petite déclaration d'amour. Je me suis toujours ou très souvent sentie en décalage dans les mileiux les jobs où j'ai évolué. là j'ai l'impression d'être au chaud parmi vous et je me réjouis à l'idée d'en croiser certains à l'ET Yzeron. Lors de la formation Mire chez moi j'avais des bouffées d'amour pour ceux qui étaient là et le matin j'ai ces mêmes bouffées d'amour quand je vous lis. Merci à vous tous.

c'est vrai et c'est tellement étrange en même temps que çà semble logique, parce que intuitivement on sait qu'il arrivera un jour où il faudra se regrouper dans un même élan , je ne pensait pas que la cohésion pouvait opérer sur un forum au travers d'échanges qui tournent souvent vite à l'auto dérision et qui se terminent dans un grand éclat de rire.
il y a des remises à niveaux; certains ont leur spécificité et peuvent oeuvrer sans que les autres ne les perturbent mais tout le monde reste accesible et compréhensible.
un grand respect une écoute permanente nous avons tous à apprendre les uns des autres.
le monde devrait fonctionner comme fonctionne ce forum, y'a de l'espoir en fait.
il me tarde de participer au ET de bougarach ...afin de voir la tronche des autres fêlés et de boire un bon coup entre potes.
mais tout ça c'est aussi et surtout grace aux chefs d'orchestre et compositeurs ....Mame et Rem.
Merci
Quartz

que rajoutter de plus et

Que c'est bon de vous lire,

Mary

Dans d'autres cultures se dissimulent aussi des trésors de sagesse, notamment chez les soufis, voie mystique de l'Islam.

La vie ordinaire

Aucune illusion n'est peut-être aussi commune et aussi insidieuse que celle qui fait croire que la vie spirituelle va éloigner le chercheur de la vie ordinaire. La vie quotidienne sera toujours incluse. En fait, nous nous immergeons de plus en plus dans l'ordinaire : « Nous coupons du bois et nous portons de l'eau ».

Nous sommes souvent le moins préparés pour cette mondanité de la voie. Après avoir goûté à la passion de l'âme qui initialement semble tellement « autre » par rapport à notre expérience ordinaire, nous avons tendance à attendre que la banalité de la vie s'efface dans l'exaltation ou dans l'extase du voyage intérieur.
Nous imaginons peut-être une vie spirituelle remplie de défis dangereux et d'états spirituels. Mais c'est seulement l'ego qui une fois encore accapare l'expérience pour ses fins propres.

Il n'est pas satisfaisant de n'être qu'un simple voyageur marchant dans la poussière en direction de sa maison !
Le caractère vraiment unique de notre nature apparaît souvent tout à fait ordinaire et simple.
Une amie décrit ainsi son expérience : « Je suis toujours choquée de constater à quel point les choses sont ordinaires, à quel point je redescends encore et encore vers l'ordinaire. Je m'attendais vraiment à ce que les choses soient "extra-ordinaires". »
Une autre amie qui vint vers mon maître s'attendait à vivre une simple vie de méditation, mais après quelques années elle se retrouva en train d'enseigner à trente enfants qui demandaient toute son attention tout au long de la journée, dans une école primaire au centre de la cité. Ce n'était pas ce qu'elle avait imaginé !

Souvent, l'attachement à l'« extraordinaire » de la vie spirituelle est un autre moyen de nous protéger contre la vie et contre nous-mêmes, de même qu'une fantaisie romantique peut nous protéger contre la vulnérabilité et les demandes d'une vraie relation.

L'amour vrai nous met à nu et nous rend vulnérables car les schémas qui nous protègent sont alors dissous ou brûlés.

Contrairement à bien des illusions, la vraie nature de la voie c'est de nous rendre de plus en plus vides, c'est de nous aider à avoir moins plutôt que plus.

Alors que les illusions gonflent le plus souvent l'ego, lui faisant croire qu'il est spécial, sur la vraie voie nous devenons plus ordinaires et plus simples.
Lorsque nous vivons la passion de l'âme, déchirés par l'amour, il se peut que nous oubliions trop aisément l'importance de payer nos factures à temps ou de prendre soin de nos besoins humains et de nos responsabilités.

Il se peut que nous traversions la vie sans bien faire attention à la façon dont nous traitons les autres et nous-mêmes.
Mais, sans une base solide dans le quotidien, sans apprendre à traiter la vie avec l'attention et le respect dont elle a besoin, il ne nous est pas possible d'y vivre pleinement l'énergie de l'âme.
Se centrer sur la vie quotidienne donne une base à l'énergie rencontrée sur le chemin, de plus cela rend difficile à l'ego de créer des fantaisies spirituelles.

C'est pourquoi, traditionnellement, quand un jeune homme venait pour la première fois au tekke (ou khânqâh - ce qui signifie centre ou refuge soufi, en turc ou en persan), on lui donnait à faire les tâches les plus mondaines ou les plus basses, par exemple : nettoyer les toilettes ou balayer la cour. Il était possible que les premières années on ne lui donne aucunes pratiques spirituelles, mais à leur place, de simples tâches de service.

Il est important de ne pas rejeter la dimension ordinaire de notre expérience, car la nature de l'âme est simple et ordinaire et s'exprime souvent dans ce qu'il y a de plus ordinaire.
L'âme est une qualité d'être dans laquelle les choses « sont », tout simplement.
Là, la paix « est », l'amour « est », même le pouvoir « est », tout simplement.
Nous ne remarquerons jamais, nous vivrons encore moins ces qualités de l'âme si nous suivons nos désirs afin d'échapper à l'ordinaire, si nous créons des drames inutiles ou des fantaisies.

Les haïku Zen reflètent souvent cette simplicité. La rosée sur l'herbe est présente, ici et maintenant, sans faire d'histoire. La pleine lune de la moisson reflétée sur l'eau est à la fois simple et profonde.
Le contenant que nous créons sur le chemin est une relation de maturité avec la vie. Nous ne serons jamais capables de vivre le paradoxe de l'ordinaire rencontrant l'extraordinaire si nous ne sommes pas prêts à accepter la vie telle qu'elle est.

La vraie tâche, c'est de rester fidèle à soi-même dans tous les défis de la vie quotidienne, de s'intérioriser ne serait-ce que cinq minutes par jour alors même qu'il y aurait des distractions nombreuses.
L'acte de se souvenir n'a plus lieu dans l'isolement, mais au bureau et au supermarché.
Il se peut que la voie soit l'opposé de ce à quoi on s'attendait ; il se peut qu'elle soit paradoxale, troublante et contraire à notre conditionnement, mais elle doit être vécue dans le monde, elle doit faire partie de la vie quotidienne.

A cette phase particulière de l'évolution de l'humanité, la nature ordinaire de la vie a une autre signification.
Dans cette ère qui commence, cet ordinaire va être capable de refléter le numineux de l'âme d'une autre façon. Mais, afin de permettre à la vie de refléter la richesse et la nature éternelle de l'âme, nous devons abandonner les schémas, personnels et collectifs, qui nous éloignent de l'ordinaire.
Nous devons apprendre à discerner entre une fantaisie de la vie spirituelle du type Disneyland avec toutes ses montagnes russes et ses barbes à papa, et la vraie manière par laquelle Il se révèle Lui-Même.


Source: Le journal Soufi